[Par Samuel Jeudy]

Port-au-Prince, le 4 juin 2022: Le bureau du Comité de normalisation de la Fédération haïtienne de football est entré en fonction le 22 janvier 2021, et ce après la confirmation de l’article 8 alinéa 2 du bureau de la FIFA sortie le 11 décembre 2020 avec un mandat qui prendra fin le 30 novembre 2022. La FIFA confirme la composition du Comité de normalisation ainsi constitué : Michaëlle Jean (Présidente), Monique André (Vice-Présidente), Jacques Letang et Yvon Sévère (Membres).

La mise en œuvre de ce Comité de Normalisation avait été déclarée, avec les missions de :

a) gérer les affaires courantes de la FHF .
b) réviser les statuts de la FHF et adapter, le cas échéant, la réglementation pertinente afin d’en garantir la         conformité avec les statuts et exigences de la FIFA .
c) organiser l’élection d’un nouveau comité exécutif de la FHF sur la base des nouveaux statuts de la FHF ;
d) assurer une bonne transition des questions financières avec le nouveau comité exécutif de la FHF.

Avant la fin de son mandat (dans quelques mois), avec un bilan assez pauvre et critique, l’équipe dirigée par Monique André et Yvon Sévère, devra faire face à cinq principaux défis pour redresser une situation catastrophique.

De fait, depuis le bannissement à vie du, Dr Yves Jean-Bart, à la tête de la FHF suite à une affaire de scandale sexuel, le football haïtien, miné par des crises à répétition, est à l’agonie. En un et quatre mois, seul le bureau de normalisation (Janvier 2021- Mai 2022) a le plein pouvoir pour décider de l’avenir du football, malgré des querelles internes et la démission de deux de ses membres et le marronnage de plusieurs cadres de la FHF. Le comité de Normalisation qui lui a tout ce qu’il faut, n’aura finalement jamais pu respecter sa feuille de route.

Aucun championnat n’a, par exemple, été organisé sous son mandat depuis le 04 juin 2021 suite à la décision du Ministère de la Jeunesse des Sports et de l’Action Civique (MJSAC), d’arrêter toutes les manifestations sportives en vue d’éviter la propagation du COVID 19. Ainsi, la FHF se voit obliger de surseoir sur l’organisation du championnat haïtien de première division qui était à sa 9e journée (série clôture) jusqu’à nouvel ordre.
Le CN, réduit à deux membres, devra désormais relever cinq défis principaux pour remettre Haïti dans le concert des grandes nations du football dans la région.

1- Reconstruire l’équipe nationale

En 2019, sous le règne de Dadou Jean-Bart, ils ont fait rêver toute une nation en se qualifiant pour les demi-finales de la Gold Cup. Depuis, les Grenadiers font difficilement de bons résultats. Le dernier en date… on s’en souvient pas.

La convocation des cadres en sélection est depuis cette date, un casse-tête chinois pour les sélectionneurs qui se succèdent, Marc Collat puis Jean-Jacques Pierre. « Les joueurs ne souhaitent plus faire de sacrifices alors que les conditions nécessaires ne sont jamais réunies pendant les matchs de la sélection », témoigne Duckens Nazon, dépité. Ce dernier reconnaît que « lorsque l’actuel entraîneur, Jean-Jacques Pierre tousse, c’est toute l’équipe qui est enrhumée ».

La participation de l’emblématique numéro 9 des Grenadiers aux matchs internationaux, est à chaque fois un véritable problème à résoudre. Ce qui a tendance à agacer certains de ses coéquipiers comme Frandzy Pierrot, Carnedjy Antoine, polémiques ouvertes avec le sélectionneur. Même si, Duckens Nazon, a toujours montré une fidélité absolue au maillot bleu et rouge, le bureau de la fédération devra rebâtir une équipe autour de nouveaux cadres, pour ramener la sérénité dans les rangs de la sélection, explique Jean-Jacques.

2- Offrir des moyens à la sélection

Les sélectionneurs notamment étrangers qui se sont succédés ces dix dernières années, se sont toujours plaints de leurs conditions de travail. Absence d’une direction technique efficace, difficultés de repérer des talents par la prospection dans les divers championnats internationaux… Conséquence : les listes de joueurs convoqués se suivent et se ressemblent souvent, sans évolution notable si ce n’est que la convocation des joueurs amateurs n’ayant aucun rapport direct avec Haïti.

La sélection de joueurs locaux n’existe pas. Ils peinent donc à constituer une réserve solide pour l’équipe A ». Et l’ancien Ministre de la Jeunesse des Sports et de l’Action Civique, Me Edwing Charles, dans un entretien, a clairement suggéré au CN/FHF de mettre rapidement en place « une direction technique nationale éfficace dans de brefs délais . Mais le véritable problème est de nommer un technicien consensuel, qui fait l’unanimité dans les vestiaires ainsi que dans les tribunes.

3– Relancer les championnats

Le désarroi des joueurs du championnat de première et deuxième division d’Haïti, est immense. Depuis juin 2021, les compétitions sont aux arrêts et les joueurs au chômage technique. Certains, comme Loubens Jérôme, milieu de terrain d’un club de deuxième division, sont obligés de travailler comme chauffeur taxi-moto pour joindre les deux bouts.

Conséquence : les sélectionneurs des équipes nationales n’ont plus d’éléments d’appréciation pour recruter de nouveaux joueurs locaux, l’exception est faite en sélection nationale pour EXAFOOT. Les équipes de première division en manquent de ressources. Le Cavaly AS a d’ailleurs été absent de la dernière Ligue des Champions de la CONCACAF, faute de visa pour voyager. Les clubs en grandes difficultés économiques et administratives, et sont obligés de jouer les rares compétitions à quatre ou à huit pour maintenir leurs effectifs en forme. Cercle vicieux : ils n’ont pas non plus les moyens de payer leurs employés, faute de compétitions et donc de subvention de la fédération.

4- Assainir les finances de la fédération

« La plupart des problèmes de la fédération tournent autour de l’argent », a-t-on constaté. De nombreuses irrégularités relevées dans les comptes de la fédération lors d’un audit commandité par la FiFA. Dans la foulée de l’audit, la FIFA a envoyé en mission le 11 septembre 2019, la trinidadienne, Stacy Daniel, Officier Manager des programmes de développement, accompagnée de l’officier en développement de la FIFA du bureau régional de la Barbade, Jordan Victoire, en vue d’une évaluation complète des projets en cours en Haïti et financés par la Fédération Internationale.

Le président Jean-Bart, critiqué même à l’intérieur de son bureau notamment par ses futurs entravés, n’a jamais pu faire taire les critiques sur la gestion des comptes de la fédération jusqu’à son bannissement. L’équipe qui a succédé au bureau de Jean-Bart n’a pas fait mieux. La FIFA attend toujours le rapport financier du Comité de Normalisation qui a géré la fédération entre décembre 2021 et janvier 2022. Et le bureau devra mettre de l’ordre dans la gestion des fonds pour bénéficier des prochaines subventions de la FIFA et de ses partenaires.

5- Assurer de bons rapports avec l’État

Même si la FIFA interdit toute ingérence de l’État dans les affaires des fédérations affiliées, les pouvoirs publics apportent leurs contributions – notamment financière – au développement des sports dans le pays. Or, les relations entre les différentes équipes de gestion du ministère des sports qui se sont succédés ces dix dernières années et la FHF sont souvent tendues. Ceci s’exprime par la réticence du gouvernement à décaisser des subventions, et parfois à signer les contrats avec l’encadrement technique de l’équipe nationale. L’actuel sélectionneur des Grenadiers Jean-Jacques Pierre n’a d’ailleurs pas la signature de son contrat depuis sa rentrée en fonction le 12 mars 2021. Il est donc nécessaire d’apaiser les rapports entre l’État et la fédération. Le comité de normalisation (CN) de la Fédération Haïtienne de Football (FHF) y parviendra-t-il ?

A suivre . . !

Samuel Jeudy

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